Pandorini : récit d’une emprise ou comment ouvrir les yeux sur la culture du viol

Pandorini raconte la rencontre entre une étudiante en école de théâtre, et un acteur français plus que célèbre. Loin d’être une histoire d’amour romantique, c’est plutôt celle d’une emprise psychologique abusive. Un homme puissant du cinéma utilise sa position pour faire du chantage à une débutante du milieu. C’est ce qu’on appel de l’abus de pouvoir, et c’est puni par la loi.

J’ai trouvé le roman extrêmement bien construit. Florence Porcel mêle adroitement extraits d’articles, d’interviews et de communiqués au récit, donnant ainsi un aperçu limpide de ce qu’est la culture du viol : ériger l’accusé en homme irréprochable, et les victimes en manipulatrices.
On sent parfaitement les mécanismes qui se mettent en place dans les esprits, on retrouve chaque argument employé, chaque raisonnement éculé de celleux qui défendent les agresseurs. Celleux qui prônent la liberté d’importuner, qui chouinent parce qu’on ne peut plus rien dire, qui disent qu’une fellation forcée ou un doigt dans le vagin ne sont pas des viols, qui trouvent anormal de salir la réputation d’un homme et de détruire sa vie…
Comment peut-on accuser Pandorini d’agression sexuelle et de viol alors qu’il défendait la cause des femmes battues en finançant des centres d’hébergement ? S’il est allé si haut dans le cinéma français, c’est que c’était une bonne personne non ? Sinon on se serait rendu compte de ses agissements ?

Et bien non, ce n’est pas si simple. On ne peut pas séparer l’artiste de l’homme : faire de bonnes actions n’effacent pas les horreurs commises.
Florence Porcel développe des arguments étayés et propose des échanges constructifs. On sort du manichéisme bon/méchant, ce que je trouve très intelligent. Je pense notamment à la fin du roman, avec l’intervention du fils de Pandorini à qui on demande comment il se positionne par rapport aux crimes commis par son père.

Florence Porcel déroule les rouages de l’emprise psychologique dont a été victime son héroïne. De son traumatisme qui entraîne un effacement partiel de sa mémoire. De son auto-persuasion qu’elle vit une belle histoire d’amour et non une relation hyper toxique et abusive.

Ce n’était pas une lecture facile. Il a fallu que je m’accroche à certains passages. Mais c’est, pour moi, une lecture essentielle puisqu’elle s’inscrit dans l’héritage direct du mouvement post-Metoo. La parole des femmes sur les agressions sexuelles dans le monde du cinéma, des médias, du sport, etc, ne s’est pas libérée, elle a enfin été écoutée.

La portée de Pandorini est d’autant plus forte que Florence Porcel a récemment porté plainte contre Patrick Poivre d’Arvor pour viols et emprise psychologique.

4 réflexions sur « Pandorini : récit d’une emprise ou comment ouvrir les yeux sur la culture du viol »

    1. Je n’ai pas encore lu Le consentement, mais j’imagine que ça se situe dans la même ligne oui. En tout cas Pandorini se lit très vite, sa construction pertinente pousse à la réflexion autour de la culture du viol en France (plutôt championne dans ce domaine…….)

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