« – C’est juste une phase que l’Afrique du Sud traverse, a-t-elle répondu sur un ton détaché. Des douleurs qui enflent.
– Comme des règles douloureuses, ai-je dit en essayant de faire le bon mot.
– Ouais, a-t-elle dit avec un faible sourire. Des règles douloureuses. »
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Titre : Règles douloureuses
Autrice : Kopano Matlwa
Editeur : Serpent à plumes
Date de publication : 2018
Prix : 18 euros
(146 pages)
Note : 5/5
Afrique du Sud, 2015. Des années durant, Masechaba a souffert de douleurs chroniques liées à une endométriose. Le sang a forgé son caractère, a fait d’elle une personne solitaire, mais l’a aussi poussé vers la médecine. À présent, jeune interne, elle s’interroge sur sa capacité à aimer tous ses patients, à leur donner toutes ses forces. De même s’interroge-t-elle sur la capacité de son pays à construire une nouvelle nation, au moment où un racisme inter-africain semble devoir remplacer l’apartheid.
Au final, c’est avec ses doutes, avec ses peurs et avec son sang que la jeune femme saura écrire son histoire, armée d’un courage entêté.
Je pensais que Règles douloureuses aurait comme sujet central les règles et l’endométriose, comme pourrait l’indiquer le titre. Finalement, ce n’est qu’un infime partie de l’histoire, d’autres thématiques importantes viennent s’y greffer.
La narratrice, Masechaba, nous raconte son histoire à la première personne. La façon dont l’autrice écrit donne l’impression que le personnage est en dialogue constant avec Dieu, sous forme de journal intime. Elle l’apostrophe, se confie à lui, le questionne…
La religion est donc très présente dans le livre, avec, entre autres, des extraits de la Bible entre les chapitres.
On découvre Masechaba jeune, à la fin de ses études de médecine. Pleine d’énergie et d’espoir, elle idéalise son futur poste en hôpital. Elle déchante très vite face à la réalité : horaires difficiles, conditions insalubres, manques de moyens et de médicaments, détresse des patients…
Le contexte politique en Afrique du Sud est instable. On le ressent très bien dans le récit, à travers les tensions entre les Noirs et les Blancs, les violentes altercations entre les différents courants politiques, et la peur d’être une femme au milieu de tout ça.
Le viol étant utilisé comme arme de guerre, les femmes font partie des premières victimes des affrontements. L’autrice décrit les événements avec à la fois pudeur et violence. J’ai eu du mal avec certains passages, tant je ressentais la douleur, la détresse et l’impuissance des personnages.
Bien que court, Règles douloureuses est un roman coup de poing qui fait partie, je pense, des lectures indispensables de cette fin d’année. D’autant plus que les deux Prix Nobel de la Paix de 2018, Denis Mukwege et Nadia Murad, militent tous deux contre l’utilisation du viol comme arme de guerre dans le monde.
Je remercie les éditions du Serpent à Plumes pour l’envoi de cette pépite !
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